Safonov, Kuzyaev, Golovin : comment les footballeurs russes s’ouvrent de plus en plus à l’Europe
A l’image de Matvey Safonov qui est sur le point de s’engager avec le Paris Saint-Germain, de plus en plus de joueurs russes apparaissent dans les championnats majeurs. Un phénomène qui s’est accentué depuis quelques années.
Championnat réputé peu exportateur comme la Turquie en Europe, la Russie a longtemps eu cette étiquette. Salaire élevée, confort au pays, culture différente des autres pays européens… De nombreux facteurs ont expliqué cette réticente des talents russes à aller voir ailleurs si le prè est plus vert. Il faut dire qu’il faut revenir à la fin des années 2000 et au début des années 2010 pour voir des joueurs russes évoluer hors de leur pays. Avec Marat Izmailov (Sporting CP entre 2007 et 2012 et FC Porto entre 2013 et 2015), Diniyar Bilyaletdinov (Everton entre 2009 et 2012), Andriy Arshavin (Arsenal entre 2009 et 2013), Yuri Zhirkov (Chelsea entre 2009 et 2011), Roman Pavluchenko (Tottenham entre 2008 et 2012) et Pavel Pogrebniak (Stuttgart entre 2009 et 2012, Fulham en 2012 et Reading entre 2012 et 2015), la Russie avait connu une belle vague de départs. Celle-ci trouvait sa source avec l’Euro 2008 où la Sbornaya avait atteint les demi-finales. Offrant ainsi une belle exposition aux meilleurs joueurs russes à une époque où le championnat local était moins exposé, la sélection avait permis de lancer une ouverture vers l’extérieur mais cela n’avait pas duré.
Mis à part Marat Izmailov qui a roulé sa bosse au Portugal ainsi que Diniyar Bilyaletdinov et Andriy Arshavin par moments, ces joueurs n’auront jamais vraiment réussi à montrer le même visage qu’en Russie. La dynamique initiée ne s’était pas maintenue et les choix du gouvernement russe n’avaient pas aidé. En vue de la Coupe du monde 2018 organisée à domicile, la Russie avait limité le nombre de joueurs étrangers à six sur les terrains. Garder les meilleurs éléments russes était donc crucial pour les clubs qui ont fait des places de choix aux internationaux. Avec 0 joueur évoluant à l’étranger lors de la Coupe du monde 2014, le seul et naturalisé Roman Neutsdäter (Schalke 04) à l’Euro 2016 ainsi que Vladimir Gabulov (FC Bruges) et Denis Cheryshev qui a vécu en Espagne depuis son enfance (Villarreal) à la Coupe du monde 2018, la Russie s’est refermée sur elle-même. Si cela a été payant avec un quart de finale à la Coupe du monde 2018, cela a tout de même freiné une certaine logique d’évolution en maintenant les joueurs dans une zone de confort. Cela s’est traduit d’ailleurs sur la scène européenne. Régulièrement entre la 6e et la 7e place (une 8e place) entre 2008 et 2019, la Russie a décliné jusqu’au 10e rang avant son exclusion des compétitions européennes en 2022 avec la Guerre en Ukraine.
Des expériences récentes encourageantes
Pour ce qui est des carrières individuelles, l’exportation des joueurs russes a pu reprendre comme souvent grâce à ses meilleurs talents. Homme fort de la sélection en 2018 à la Coupe du monde et sensation au CSKA Moscou, Aleksandr Golovin avait mis les plus grands dans sa poche. Suivi par Chelsea, la Juventus et l’AS Monaco, il avait finalement opté pour l’ASM dans l’optique de grandir plus doucement. Un choix à moitié payant pour le natif de Kaltan. Certes, il n’a pas profité de Monaco comme un palier pour monter encore plus haut, mais il est clairement l’un des meilleurs joueurs de l’effectif depuis son arrivée il y a désormais six ans. Une aventure en France qui se passe parfaitement pour le milieu offensif qui est une référence à son poste en Ligue 1 même s’il n’a pas toujours été épargné par les blessures. Précurseur, Aleksandr Golovin et son aventure monégasque plutôt réussie ont redonné de l’espoir à l’exportation de joueurs russes.
S’il y a eu quelques échecs comme Fedor Smolov (Celta de Vigo en 2020) ou Fedor Chalov (Bâle en 2022), les expériences sont plutôt encourageantes. Parti du Lokomotiv Moscou en 2020 pour l’Atalanta, Aleksey Miranchuk roule sa bosse en Italie. Après deux premières saisons compliquées avec Gian Piero Gasperini, il avait été prêté au Torino l’an dernier où il s’est totalement relancé. Encore une fois hors des plans de Gian Piero Gasperini cette saison, il a su convaincre l’Italien grâce à un début d’année 2024 canon et facture enfin son meilleur exercice avec la Dea (4 buts et 12 offrandes en 40 matches) malgré son rôle de remplaçant. Avec une Ligue Europa dans ses bagages et une importance dès qu’il a du temps de jeu, le joueur de 28 ans a fait preuve de caractère pour se faire sa place en Italie. D’ailleurs son frère Anton Miranchuk est sur le point d’aller au PAOK Salonique où on y retrouve Magomed Ozdoev. L’été dernier, deux autres joueurs russes avaient fait le choix d’aller en Europe. Tout d’abord en France, Daler Kuzyaev a rejoint Le Havre. Pas toujours titulaire, mais très important dans l’équipe de Luka Elsner, le joueur de 31 ans qui aurait pu jouer à Marseille, Bordeaux, Toulouse ou encore en Écosse sur les 2/3 dernières années n’a pas hésité à faire le grand saut.
Une décision également prise par Arsen Zakharyan. Le joueur de 21 ans qui est un des plus grands espoirs du football russe aurait d’ailleurs pu/du atterrir à Chelsea sans la guerre en Ukraine. Les sanctions contre la Russie ont bloqué l’acheminement des fonds du transfert. Les Blues ont même essayé de le recruter via Strasbourg, mais c’est finalement en Espagne, à la Real Sociedad, qu’il a débarqué. La première saison est pour le moment mitigé pour Arsen Zakharyan qui est en plein apprentissage (40 matches, 1 but et 2 offrandes). Néanmoins avec lui, il est question de long terme puisqu’il a signé jusqu’en juin 2029 et a su tout de même s’acclimater. Après ces expériences récentes, c’est donc Matvey Safonov portier de Krasnodar qui se rapproche du Paris Saint-Germain. Un nouveau dossier qui montre que malgré la guerre, les mentalités isolationnistes des joueurs russes sont moins marquées. Avec des talents comme Konstantin Tyukavin (21 ans, Dinamo Moscou), Sergey Pinyaev (19 ans, Lokomotiv Moscou) ou encore Nikita Saltikov (19 ans, Kylya Sovetov) qui pointent le bout de leur nez, nul doute que ce phénomène risque de se poursuivre. D’autant plus que la limite de joueurs étrangers qui est actuellement de 8 a de fortes chances de passer à 13 la saison prochaine. Une réforme qui ne contraindra plus les clubs à forcément miser autant sur les locaux après plusieurs années à intensifier la formation.
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